L'haleine animale est nauséabonde et manque de te désarçonner alors que tu es en plein combat. Courageuse pour une simple fillette de quatorze ans, tu te bats comme une lionne, évitant et déviant les coups de l'ennemi beaucoup plus grand et imposant que toi. Tu le sens ce poids énorme que tu dois repousser à tous prix pour éviter de perdre la vie à coup sûr. Alors tu t'empares d'un couteau en argent que tu avais glissé négligemment à ta ceinture. Trouvant le courage et la force au fond de toi et en te rappelant des enseignements que t'ont prodigué tes parents, tu vises rapidement la jugulaire. Le monstre hurle, il griffe, se débat contre la mort pourtant inévitable. Pendant plusieurs minutes rien ne se passe. Tu restes immobile tout comme la bête devant toi qui petit à petit semble rétrécir, prendre forme humaine. Est- ce une illusion de sa part pour éviter de mourir ? Non, impossible. L'argent est fatal pour son espèce. Alors tu plonges un peu plus dans le cou ce couteau qui te brûle les mains. Tu savoures, tu exaltes ce cri déchirant, tu trembles aussi. Les yeux dans les yeux, tu vois ton adversaire perdre. Un sourire fier se dessine sur ton visage tandis que tu te dégages lentement de son emprise. La vie quitte son corps, tu le vois. Tu enlèves d'un coup sec ton couteau et tu admires ton oeuvre, ton premier loup garou.

Daernys se réveilla en sursaut comme si elle y était encore. Ce cauchemar revenait de plus en plus souvent pour une raison inconnue. Passant une main sur le côté gauche de son visage, elle soupira bruyamment avant de quitter son lit chaud. Fatiguée, elle se dirigea vers un coin de sa chambre où se trouvait une bouteille d'eau et s'en servit pour se rafraîchir légèrement. La jeune femme alla ensuite vers sa fenêtre qu'elle ouvrit un petit peu de façon à laisser entrer une quantité précise d'air. Manquant clairement de sommeil, elle ne se rendit pas compte que le soleil venait de se lever et que son réveil indiquait presque six heures du matin. Le week end avait défilé à une vitesse incroyable et le lundi était arrivé rapidement. Daernys se traîna jusqu'à la salle de bain avec la ferme intention de se réveiller sous une bonne douche. Comme si c'était un rituel, elle soigna ses gestes et profita du contact brûlant de l'eau chaude contre sa peau. Avec un soupir de soulagement, la jeune femme sortit trempée de la salle de bain avec une serviette enroulée autour de son corps menu. Elle trouva une tenue sobre qui mettait tout de même ses courbes en valeur et s'en vêtit juste après. Au bout d'une heure, elle était fin prête et sortit de la maison, clefs à la main et sac en bandoulière. Bizarrement, la jeune femme sentait que la journée allait mal se terminer. Elle avait raison.

Pendant toute la journée, elle supporta l'ignorance et la stupidité des personnes du lycée en pensant à comment elle pourrait tuer un loup garou de la façon la plus cruelle possible. Les heures passèrent et Daernys serrait les dents pour éviter de cogner quelqu'un. Le dernier cours de la journée fut donc idéal. Arrivant en retard à son cours, elle ignora le regard du professeur et se dirigea vers le fond de la pièce où elle prit place, seule. Laissant son regard se balader dans la salle, elle bloqua sur un visage familier et détestable. Gabryel Field. Déjà d'une humeur massacrante, elle s'attaqua à son cahier et dessina toutes sortes de représentations dignes de son imagination. En plein milieu du cours, elle releva cependant la tête quand le professeur cita son nom. « Daernys Lockwood et Gabryel Field, vous travaillerez ensemble sur un sujet de votre choix à rendre pour demain. » Malgré les protestations de l'ensemble de la classe à cause de ce devoir soudain et des nombreux regards noirs de Daernys, le professeur ne changea pas de décision et quitta la pièce dès que la sonnerie résonna. Furieuse, la jeune femme rangea ses affaires et sentit une présence irritante près d'elle. Gabryel déposa un bout de papier devant elle avant de s'éclipser. Posant un seul regard sur la feuille, son moral en prit un sérieux coup. Il lui donnait rendez-vous chez lui le soir même pour travailler sur le devoir. Attrapant le feuillet, elle le chiffonna et le laissa tomber dans la corbeille en sortant. Quel abruti.

Quelques heures plus tard, elle était garée devant sa maison en regrettant amèrement d'être venue et de devoir faire ce foutu travail avec lui. Qu'avait-elle fait de mal pour tomber sur lui et pas quelqu'un d'autre ? Restant quelques instants encore dans sa voiture, elle en descendit pourtant, résignée à ce que ce devoir se fasse vite fait, bien fait. Claquant la porte d'une façon sonore, elle se dirigea vers la porte d'entrée qui s'ouvrait déjà sur Gabryel, tout sourire. Fronçant les sourcils et plissant les yeux, elle passa sans un regard pour lui et entra directement dans le hall d'entrée. Croisant les bras, elle recula de quelques pas en remarquant qu'il était si près d'elle et que la porte était fermée. Il semblait se délecter de la scène ce qui ne fit qu'exaspérer un peu plus la jeune femme. « Bon je ne compte pas rester toute la nuit, alors tu vas me dire où on peut travailler ou tu penses rester planté ici ? »

Le sourire narquois s'étalait sur son visage et lui donnait un air effrayant. Gabryel activait la roulette de sa souris, descendant page après page, cherchant l'élément parfait dont il avait besoin. Finalement, il la trouvai. Cela n'avait pas été une tâche facile mais il en avait pourtant trouvé une : une photo de Daernys. Cette jeune femme le rendait complètement fou, et la plupart du temps, fou de rage. Le jeune homme s'amusait à mener la danse d'un pas vif et ne manquait pas une occasion de changer de musique pour accélérer le tempo. Il avait alors préparé le plan parfait, et elle allait en être la principale participante. Le fait était que, le jeune homme savait pertinemment qu'il y avait une chose à laquelle elle ne dérogerait jamais. Les cours. Mais bien entendu, il était difficile de se parler lorsque les professeurs étaient aussi vieux jeu, à ne pas autoriser de bavardages durant ceux-ci. Et Daernys pouvait très bien l'ignorer comme elle le faisait la plupart du temps, lorsqu'elle ne s'emportait pas. C'était la meilleure partie, ça. Lorsqu'elle s'emportait. Il l'observait agiter son corps et sa tête dans tous les sens, hausser le ton tandis que lui conservait un air amusé. Parfois, elle l'énervait vraiment et il haussait le ton également, mais la plupart du temps, il se moquait d'elle simplement pour la taquiner. S'il y avait une chose qu'il avait toujours souhaité, c'était de pouvoir la mettre dans son lit. Une sorte de défi qu'il s'était fixé depuis la première fois où elle l'avait rejeté. Malheureusement, cela n'était pas encore arrivé.

La photo sortit par l'imprimante et Gabryel admira son ouvrage. Il avait redimensionné l'image pour qu'elle puisse rentrer dans un cadre qu'il avait soigneusement choisi pour l'occasion. Glissant la photo de Daernys à l'intérieur, il la posa ensuite sur sa table de chevet, comme si c'était la chose qu'il regardait avant de s'endormir pour faire de beaux rêves. Il ricana tout seul. Finalement, il jeta un coup d’œil à son réveil qui était posé à côté de son ordinateur et décida qu'il était temps de se préparer pour aller en cours. Il s'était levé une demi heure en avance pour elle, et espérait que cela porterait ses fruits. Sa recherche avait été ardue, puisqu'elle ne semblait pas accro aux réseaux sociaux comme d'autres adolescents. Enfin bon, tant mieux, il avait trouvé ce qu'il cherchait. Se déshabillant nonchalamment, le jeune homme plongea dans le bain qu'il s'était préparé dans sa grande baignoire personnelle. Il avait une salle de bain pour lui, attenante à sa chambre. Plusieurs dizaines de minutes plongé dans l'eau aux senteurs délicieuses lui suffirent avant de se laver scrupuleusement, de se rincer et de ressortir. Il sécha ses cheveux rapidement, leur donnant un effet décoiffé qui plaisait aux filles et qui l'arrangeait. Passant constamment la main dans ses cheveux, il se serait rapidement décoiffé s'il y prêtait attention. Finalement, il enfila un t-shirt et un jean, avec une veste en cuir.

Il se rendit au lycée en voiture. Ce 4x4 noir lui avait été offert lorsqu'il avait eu son permis, et il s'en servait tous les jours depuis. La journée passa rapidement, cours cours cours. Il arrosa une fille dans les toilettes pour faire une blague. Et finalement, ce qu'il attendait : le dernier cours de la journée. Il arriva quelques minutes en avance pour demander au professeur s'il pouvait leur donner un devoir en groupe, ayant une superbe idée sur le sujet. C'était donc à cause de lui que tout le monde, ensuite, grogna et râla. Heureusement, il n'y eut aucune mention de Gabryel dans les mots du professeur. Lorsqu'il annonça le nom de Daernys avec le sien, le jeune homme écrit rapidement sur un papier leur lieu de rendez vous et le posa sur la table de la jeune femme avec un sourire. Sans prendre plus d'attention à elle, il sortit et rentra chez lui en voiture. Elle ne viendrait pas tout de suite, non. Elle rentrerait d'abord chez elle, pas pour se changer et se maquiller comme toutes les autres, mais simplement parce qu'elle n'envisageait sûrement pas de passer tout son après midi avec cet idiot. Gabryel était sur qu'elle le pensait idiot, détestable, et tous les autres défauts au monde. Cela ne le dérangeait pas, au contraire. Cela le poussait à la renforcer dans son idée, celle qu'il pouvait être un méchant, un vrai.

Quelques heures plus tard, alors qu'il scrutait par la fenêtre l'entrée de sa propriété, il entendit la porte de Daernys claquer et la vit se diriger vers la porte d'entrée. Gabryel se précipita pour ouvrir la porte avant qu'elle ne pense à toquer ou à sonner. Un grand sourire ornait son visage, mais pas un sourire gentillet. Un sourire de celui qui était satisfait de lui même, et uniquement de lui même. Daernys lui passa devant en trombe pour entrer sans avoir été invitée (au moins, elle n'est pas un vampire, pensa-t-il.), et Gabryel referma la porte avant de l'écouter. « Nous allons .. dans ma chambre. Au passage, ça ne me dérange pas du tout que tu restes toute la nuit ici. » Il lui sourit et la dirigea vers l'étage qu'ils montèrent en ascenseur. Il fit exprès, pour qu'ils soient coincés à deux dans un petit espace. Pas assez petit pour qu'il y ait un quelconque contact physique, mais assez pour qu'il puisse la fixer intensément et qu'elle ne puisse guère regarder autre part. Toujours dans l'ascenseur, il prit la parole. « J'ai tellement hâte de travailler avec toi. » Le ton qu'il utilisa sur le mot « travailler » montrait clairement qu'il ne pensait en aucun cas à faire ce projet. Finalement, ils arrivèrent à l'étage réservé à Gabryel et sortirent pour se retrouver dans le salon attenant à sa chambre. Il la guida encore vers son espace personnel, la pièce où il dormait et .. admirait sa magnifique photo à côté de son lit. Il feignit de se rendre compte qu'il avait oublié de la cacher et se précipita vers la table de nuit pour cacher ce cadre contenant l'image de Daernys. « J'espère que tu n'as rien vu » Subtilité = 0.

Elle avait toujours détesté les personnes hypocrites, égocentriques, arrogantes et comme presque tout le monde était comme cela, Daernys se faisait un plaisir de les ignorer et de les envoyer voir ailleurs. Cela avait été le cas, un an plus tôt avec Gabryel, qui lui avait fait ouvertement des avances. La plupart des filles auraient été ravies et auraient accepté sans attendre mais la jeune femme n'était pas comme cela. Au lieu de dire oui et de filer directement chez elle pour se préparer en pensant à la merveilleuse soirée qu'elle allait avoir, la jeune femme lui avait froidement répondu en pensant qu'il allait la laisser tranquille. Elle s'était bien trompée car elle devint rapidement une sorte d'obsession pour le jeune homme qui, elle le sait, s'était fixé l'objectif de séduire Daernys et de passer la nuit avec elle. Il perdait son temps avec elle. Daernys l'a prévenu pendant longtemps et voyant qu'il n'écoutait rien, avait abandonné et s'était contentée de l'ignorer royalement, créant l'effarement chez la gent féminine du lycée qui à chaque fois qu'elle le faisait, causait des murmures incessants et indignés. Heureusement qu'elle pouvait se défouler pendant les chasses car jamais elle n'aurait tenu sans cela à supporter non seulement Gabryel mais aussi les railleries dues à son attitude vis à vis de lui, ce qui était tout de même assez ironique du point de vue de la lycéenne. A croire que même le destin s'en mêlait maintenant à moins que ce n'était là que l'oeuvre de Gabryel afin de réussir le défi qu'il s'était lancé. Mais bon, même si il était prêt à tout il ne serait tout de même pas allé jusqu'à proposer au professeur un devoir et lui suggérer avec qui il voulait être ? Non. La jeune femme devenait trop paranoïaque ..

Silencieuse, Daernys examinait le hall d'entrée avec curiosité pendant que Gabryel .. Que faisait-il d'ailleurs ? Jetant un regard au jeune homme qui n'éveillait en elle que du dégoût et de la colère, la jeune femme qui avait toujours les bras croisés, fusilla du regard suite à ses premières paroles qui comme Daernys le pensait étaient suggestives. « Nous allons .. dans ma chambre. Au passage, ça ne me dérange pas du tout que tu restes toute la nuit ici. » Levant les yeux au ciel, elle se jura de tenir toute la nuit éveillée si il le fallait pour éviter de dormir ici et que Gabryel en profite. Et qu'est ce qu'elle pouvait détester ce sourire qu'il arborait maintenant, ce sourire si satisfait. De mauvaise humeur, elle marcha après Gabryel quand il la dirigea vers une sorte d'ascenseur. Plutôt original dans une maison, surtout qu'elle se doutait très bien que cela plaisait au jeune homme. Quoi de mieux qu'un endroit confiné pour se rapprocher d'une personne qui ne pouvait pas fuir ? L'humeur de Daernys empirait et si il continuait comme cela, il allait s'en prendre une et finir amoché. Espérant ne pas en arriver là et donc risquer de faire douter Gabryel sur sa nature, elle pria inconsciemment pour qu'il arrête ses tentatives vaines et désespérées particulièrement pitoyables. Comme si il pouvait s'en empêcher .. « J'ai tellement hâte de travailler avec toi. » Bon sang ! Serrant les poings et les dents, la jeune femme resta muette devant la nouvelle remarque de Gabryel qui avait insisté sur le mot travailler pour lui faire penser clairement que ce n'était pas à ça qu'il pensait. Abruti.

L'arrivé à l'étage fut donc un vrai soulagement pour la jeune femme, heureuse d'avoir un peu plus d'espace à elle. Il la mena vers sa chambre et s'arrêta. Admirant sa chambre d'une façon prudente, son regard s'arrêta sur un cadre près du lit de Gabryel. La photo lui disait quelque chose et la jeune femme aux traits familiers la rendit furieuse. A quoi jouait-il exactement ? Sourcils froncés, lèvres pincées, elle se tourna vers Gabryel qui devait jubiler. Elle faillit lui jeter quelque chose à la tête quand elle le vit partit cacher la cadre. Trop tard. « J'espère que tu n'as rien vu » Il se fichait vraiment d'elle là. Toujours aussi retournée d'avoir vu une photo d'elle dans sa chambre. Ses soupçons concernant un plan mis en place par Gabryel dont la partie photo d'elle près de son lit en faisait partie, se confirmèrent peu à peu. « Et moi j'espère franchement que c'est une blague. » Jetant un regard noir à Gabryel qui perdait un peu d'assurance devant la réaction de Daernys puisqu'il devait sans doute imaginer dans son esprit tordu qu'elle allait se jeter à son coup, touchée par tant d'attention, la jeune femme se planta devant la jeune homme, déterminée à mettre les choses au point pour ce soir. « Ecoute moi bien. Je suis venue ici dans le but de travailler et je te conseille vivement d'arrêter tout ça sinon je te garantie que tu vas le regretter. » Associant la paroles aux actes, elle prit le cadre dans ses mains et ôta la photo en papier qu'il avait donc trouvé sur internet et la chiffonna.

Gabryel éprouvait un malin plaisir à rendre cette jeune femme folle. Cela ne lui était jamais arrivé auparavant et c'était un sentiment tellement grisant qu'il ne pouvait pas s'empêcher de continuer. Il voulait la faire sortir de ses gonds, qu'elle lui crie dessus, qu'elle soit peut-être méchante, aussi. Il admirait la fourberie qui vivait en Daernys et voulait la voir en action. C'était ce pourquoi il avait mis tout cela en place, et pour tout avouer, Gabryel était plutôt fier de lui. Pour l'instant, tout se passait délicieusement bien et il sentait la tension en Daernys monter à chaque fois qu'il ouvrait la bouche ou faisait quelque chose. Elle devait être folle ! Elle devait le détester ! Et cette pensée amena un sourire sur le visage du jeune homme. Jamais il ne s'était amusé autant, mais il y avait un sentiment qu'il ne saurait pas vraiment décrire qui qualifiait aussi ce qu'il ressentait en faisant ça. Mais cela le rendait bien. Pire que lorsqu'il faisait les pires blagues à ceux qu'il haïssait le plus. Et puis, il était plutôt content d'avoir de la compagnie féminine, même si cette compagnie le haïssait au plus haut point. Il se disait ça, mais Gabryel pensait que Daernys ne le détestait pas tant que ça. Penser que ce soit faux lui aurait fait de la peine, et il s'efforçait de ne jamais penser de manière négative à ce genre de chose.

« Et moi j'espère franchement que c'est une blague. » Il releva les yeux vers elle, d'un regard amusé, et la vit lui jeter un regard noir. Des frissons lui passèrent dans la poitrine et il ne put s'empêcher de ricaner légèrement en regardant autour de lui. Une blague ? Pas vraiment. Ou peut-être que si ? Après tout, est-ce qu'il était vraiment attiré par cette fille ? Oui, elle était jolie. Mais .. Si, elle était sexy également. Mais elle semblait avoir un caractère de cochon et Gabryel n'était pas du genre à s'embarrasser de filles comme ça, qui devait en plus être très inexperimentée dans la chambre. « une blague ? Je n'en sais rien. » Il resta très évasif, un peu déconcerté bien sûr car il ne pensait pas qu'elle réagirait tout de même comme ça. Et alors qu'il regardait autre part, il sentit Daernys s'approcher de lui et l'observa. C'était vrai qu'elle avait un joli visage, quand même. Elle avait des tâches de rousseur adorables. « Ecoute moi bien. Je suis venue ici dans le but de travailler et je te conseille vivement d'arrêter tout ça sinon je te garantie que tu vas le regretter. » Il écarquilla un peu les yeux en l'observant prendre le cadre et chiffonner le bout de papier qu'il avait imprimé le matin même.

Gabryel ne pensait pas qu'elle irait dans de telles extrêmes, tout de même. Mais à présent, elle devait avoir compris qu'il ne faisait cela que pour l'énerver. Il paraissait qu'être méchant avec les femmes les faisaient être attirés par vous. Gabryel n'était pas sûr de cette théorie, et en tout cas, cela ne marchait pas avec Daernys. « Hey ! C'est un arbre que tu viens de gaspiller, là. » Toujours avec son humour douteux, il s'approcha d'elle et la força à ouvrir sa main pour prendre le papier, le déplier et regarder ce qu'il en restait. « T'es même pas si jolie que ça, c'est vrai. » Il ré-chiffonna le papier et le lança vers la poubelle. Il atterrit en plein dans le mile, heureusement parce que sinon il se serait senti mal. En poussant un soupir, il s'approcha du bureau et tira deux chaises. « Je t'en prie, assieds toi à mes côtés que nous puissions commencer ce projet au choix. Au fait, t'as une idée pour le thème ? » Il semblait s'être assagi, mais ce n'était pas vraiment cela. Son téléphone sonna tout à coup et le jeune homme décrocha pour trouver sa petite amie du moment à l'autre bout du fil. « Non, je suis occupé. » Un moment de silence. « Je suis .. Mon père m'a dit pas de fille chez moi aujourd'hui .. Oui .. Salut .. » Il remit son téléphone dans sa poche et s'assit à côté de Daernys qui s'était installée. « Quand tu dis que je vais le regretter, tu le dis de quelle manière ? Tu sais, de manière : je vais t'arracher tes vêtements et te faire l'amour sur le lit, ou de manière : je vais trouver un couteau et te poignarder ? Je préfère la première option si tu veux bien. »

On dit souvent que la haine et l'amour sont indissociables et que l'un mène inévitablement à l'autre. Il y a eu beaucoup de films et de chansons avec cet état d'esprit et au lycée, on évoquait aussi cette idée à propos de Daernys et Gabryel. Bêtises. La jeune femme n'était absolument pas attirée par lui. Au fond d'elle bien sûr, elle savait que c'était faux et qu'elle ne pourrait pas dire qu'elle n'a jamais pensé à lui une fois ou qu'elle n'a pas jeté un seul regard sur lui au lycée sans mentir. Le trouvait-elle à son goût ? Peut-être ? Quoique un peu petit. Et puis une chasseuse ne devait pas s'encombrer d'un tel gars, seulement bons à faire du mal et à coucher une nuit. Non. Sa mère lui avait conseillé de privilégier un chasseur ou un humain particulier pour supporter la nouvelle et peut-être, être initié et elle comptait bien suivre ce conseil. Ce n'est pas comme si elle avait vraiment l'intention de se laisser séduire ou de flirter avec Gabryel, un type qui avait tous les défauts qu'elle détestait le plus au monde. Imbu de lui même, égocentrique, égoïste .. Oui. Elle le haïssait du plus profond de son coeur. Déterminée à tout faire pour détruire tous les efforts de Gabryel les uns après les autres et à le faire abandonner tous projets qu'il avait pour elle. Autrement dit, elle acceptait de jouer et il devrait se méfier d'elle car ce qu'il voit n'est que le début, la surface de la coquille.

Il voulait l'énerver, la pousser à bouts. Il ne réussirait pas. La jeune femme s'évertua à se calmer et à respirer plus doucement. Comme si elle analysait une situation de combat face à un adversaire, l'esprit de Daernys devint clair. Elle eut une réaction tout à fait neutre quand Gabryel lui répondit. « Une blague ? Je n'en sais rien. » Était-il sérieux ? Un simple regard permit à la jeune femme de penser qu'il était un peu déconcerté par sa remarque. Tout de même méfiante vis à vis de lui, elle n'hésiterait pas à partir si vraiment cela dégénérait. Daernys ne savait pas quoi en penser. Perdue dans ses réflexions, ce que dit Gabryel peu après qu'elle ait chiffonné la photo, ne la fit pas réagir tout de suite. « Hey ! C'est un arbre que tu viens de gaspiller, là. » Daernys s'obligea à rester calme et sereine quand elle avait envie de lui répondre sans aucune subtilité qu'il était un abruti et que à la base c'est lui qui avait gaspiller un arbre en l'imprimant. Quand elle sentit la main de Gabryel effleurer la sienne, elle le laissa tout de suite prendre le bout de papier, inutile de laisser son mauvais caractère intervenir et satisfaire le jeune homme. « T'es même pas si jolie que ça, c'est vrai. » Là c'était tout de même trop. La jeune femme se pinça très fort la lèvre inférieure, le goût âcre du sang emplit sa bouche. Elle ne pouvait pas laisser passer cette occasion de lui répondre. « Alors pourquoi tu t'évertues tant à me mettre dans ton lit si je ne suis pas si jolie que ça ? » Levant les yeux en l'air et failli applaudir pour l'embêter quand il lança directement le bout de papier dans la corbeille. Cela aurait été marrant qu'il rate son coup pour éviter de se croire supérieur pour quelques secondes. Quand il se dirigea vers un bureau et qu'il tira deux chaises, elle prit place sur l'une d'elle et posa son sac à terre. « Je t'en prie, assieds toi à mes côtés que nous puissions commencer ce projet au choix. Au fait, t'as une idée pour le thème ? »

Une idée .. Les adolescents obsédés et idiots ? Réfléchissant à une idée qui serait acceptée par Gabryel et toujours méfiante par rapport au soudain sérieux de ce dernier, une sonnerie brisa le silence ambiant. Daernys soupira quand elle le vit répondre. Il ne se gênait vraiment pas pour ne pas travailler et l'aider. « Non, je suis occupé. [...] Je suis .. Mon père m'a dit pas de fille chez moi aujourd'hui .. Oui .. Salut .. » Et il raccrocha après avoir sorti une ridicule excuse à son attraction du moment. Moqueuse, elle ne se gêna pas pour commenter cette conversation très intéressante. « Plutôt minable comme excuse non ? Surtout qu'elle doit se douter que c'est faux. » La lycéenne le regarda s'asseoir à côté d'elle, un sourire en coin des lèvres. Sourire qui disparût quelques instants plus tard. « Quand tu dis que je vais le regretter, tu le dis de quelle manière ? Tu sais, de manière : je vais t'arracher tes vêtements et te faire l'amour sur le lit, ou de manière : je vais trouver un couteau et te poignarder ? Je préfère la première option si tu veux bien. » Incroyable ! Il ne pouvait pas rester sérieux plus de deux minutes sans draguer. Lassée, elle sortit un calepin et un stylo de son sac puis lui lança un regard qui voulait tout dire. « Je dirai option numéro trois qui consiste à t'obliger à travailler en te plantant mon crayon dans le bras voire la main si tu recommences avec tes commentaires suggestifs détestables. »

Daernys était une excellente compagnonne de jeu. En effet, elle répondait du tac au tac avec des remarques à faire trembler un mort. Cela rendait le jeune homme très amusé, bien qu'à certaines remarques, il fut obligé de paraître un peu surpris. Oui, elle savait répondre. Malheureusement, il ne put s'empêcher de se sentir légèrement en compétition avec elle, lui qui savait si bien répondre à la face des gens ce qu'ils ne voulaient entendre. « Alors pourquoi tu t'évertues tant à me mettre dans ton lit si je ne suis pas si jolie que ça ? » Ainsi, elle avait compris son but ultime ? Elle devait avoir une haute opinion d'elle même pour penser que c'était l'objectif de Gabryel. Après tout, oui, il faisait des remarques qui n'étaient pas toujours très subtiles, mais il ne lui avait jamais dit directement. Il pouvait très bien la taquiner pour son propre amusement, sans but ultérieur. Mais non. Elle savait ce qu'il voulait à présent et le lui avait dit. « Peut-être parce que tu es difficile à obtenir. C'est un défi. » Il lui avait dit très sérieusement, pour une fois, sans mentir et s'amuser. C'était la principale raison qui le poussait à agir de cette manière. Plus elle fuyait, plus il la suivait. C'était un jeu qu'il aimait et qu'il ne voulait pas arrêter. Pas encore. Peut-être qu'il ne l'attraperait jamais, mais il devait toujours essayer.

Lorsqu'il reçut l'appel téléphonique, il s'attendait bien à une remarque de la part de Daernys. A vrai dire, il avait eut envie de lui faire sentir qu'il était avec elle, et qu'il préférait être avec elle qu'avec sa propre petite amie. Ce qui était, pour ainsi dire, très vrai. Il sortait actuellement avec une belle blonde qui n'avait pas d'autre occupation que passer des heures à choisir ses vêtements et sa couleur de vernis à ongles pour la journée. Elle était également fan de ces livres de vampire à la mode et dévorait tout ce qui tombait sous sa main, aussi nuls que ces livres étaient. Au moins, elle savait lire. « Plutôt minable comme excuse non ? Surtout qu'elle doit se douter que c'est faux. » Gabryel sourit en coin en poussant un petit soupir. « Si tu savais ce que je lui dis et qu'elle croit sur parole, tu ne ferais pas cette remarque. Tu ne la connais pas ? C'est Wendy, elle est assise pas loin de toi en histoire. » Elle devait la connaître. Après tout, cette fille avait la réputation de ne pas avoir un QI très élevé. Mais elle était jolie et pour l'instant, cela suffisait à Gabryel. Il n'avait jamais pensé qu'on pouvait avoir une petite amie et s'intéresser réellement à elle.

Ils étaient à présent assis l'un à côté de l'autre pour travailler et Gabryel aimait bien cette position. A vrai dire, il était assez près de Daernys pour sentir son parfum discret, qui était très agréable. Il ne fit pas le lourd en se rapprochant plus d'elle, pensant en avoir déjà fait assez auparavant. « Je dirai option numéro trois qui consiste à t'obliger à travailler en te plantant mon crayon dans le bras voire la main si tu recommences avec tes commentaires suggestifs détestables. » Il éclata de rire. Tout simplement parce qu'il doutait fortement que la jeune femme soit capable de faire une chose pareille. Il pensait que c'était une blague, et pourtant, il était si loin de la réalité. « Mais bien sûr ! A ce que je sache tu n'es pas Hulk, d'ailleurs, tu es toute fluette. Je doute que tu puisses me faire bien mal avec un simple stylo. » Il sortit des affaires qui pourraient les aider, son ordinateur sur le côté, et des feuilles ainsi que plusieurs stylos si elle voulait changer de couleur.

« Moi j'ai une idée de thème. Que dirais-tu des composants chimiques responsables de l'attirance entre deux êtres humains ? Je trouve que c'est intéressant. » Bien entendu, encore un sous entendu qui était dirigé vers Daernys. Si près d'elle, il se sentait près à prendre son visage et à l'embrasser. Une toute autre envie que celle qu'il avait auprès des nombreuses femmes avec qui il était sorti. C'était tellement agréable, qu'il voulait faire durer cela le plus longtemps possible. Il prit lui même un stylo et le fit tourner entre ses doigts. « Je parie que tu n'as jamais embrassé personne. »